Savoir écouter pour guérir de nos crises (avec Germaine Pomier)

Deuil et guérison : comment guérir ?

#ÉtudiantsFantômes, annonces de suicides chez les étudiants ou de détresse psychologique chez les soignants, hôpitaux bondés, familles en deuil : la situation sanitaire liée à la Covid-19 aura eu sur nous un impact psychologique très profond. Face à ces réalités, la question demeure. Comment, à l’échelle individuelle, peut-on gérer nos conflits et nos difficultés ? Comment, à l’échelle de la société, peut-on vivre la mort, la souffrance, et y donner un sens ?


Pour nous aider dans ces réflexions, l’équipe de Sagesse et Mojito reçoit Germaine Pomier, spécialiste du soin et de l’accompagnement. Pendant sept ans, elle a été infirmière dans une maison d’accueil pour les adultes en difficulté (polytoxicomanes, en rupture familiale, souffrant de maladie psychiatrique ou d’alcoolisme, etc.) et poursuit aujourd’hui son activité en milieu hospitalier. Elle est aussi conseillère conjugale et familiale au sein de l’association AFP.écoute.

Dans cet épisode, Germaine nous explique l’importance, dans tout processus de guérison, à la fois d’écouter et d’être écouté·e. Et, même si c’est dérangeant, de rechercher la vérité.



Germaine Pomier a une expérience plurielle dans le soin et l’accompagnement. Infirmière en clinique, en hôpital, en maison d’accueil, conseillère familiale et conjugale en cabinet, en association ou encore dans le cadre de consultations pré-IVG et post-IVG, elle sait accompagner l’autre dans ses difficultés pour l’amener vers la guérison. 

Le plus important selon elle ? Apprendre à écouter, et rechercher la vérité.


Quoi de neuf, docteur ? 

Au fil de ses entretiens, Germaine constate que les problématiques auxquelles nous faisons face n’ont pas changé. Peurs, anxiété, insécurités, difficultés relationnelles : les défis psychologiques sont les mêmes en 2021 qu’auparavant. 

Néanmoins, la série de confinements, déconfinements et reconfinements — et tout ce que cela implique d’incertitudes et de facteurs anxiogènes a agi, pour les individus comme pour nos sociétés, comme un révélateur de troubles déjà présents, mais parfois enfouis. 

« La situation sanitaire a accentué les tensions déjà présentes. Elle révèle la réalité du lien conjugal ou familial. »

Comment, à l’échelle individuelle, peut-on gérer nos conflits et nos difficultés ? 

Comment, à l’échelle de la société, peut-on vivre la mort, la souffrance, et y donner un sens ?


Une première étape : aimer

En tant que soignante et accompagnante, il n’est pas toujours simple d’affronter ces troubles et ces tensions, souvent exprimés dans la violence. C’est pourquoi Germaine insiste pour dissocier la personne de ses actes. 

L’être humain peut malheureusement faire des horreurs, mais c’est possible de l’aimer, sans pour autant approuver ce qu’il fait. C’est cet amour pour l’autre qui permet d’accompagner des situations de détresse parfois sévères. L’objectif de l’accompagnement est ensuite d’aider la personne à travailler sur les raisons profondes derrière ses actes et ses émotions.

« L’être humain, moi je l’aime… mais les horreurs qu’il fait, non. »

Une première étape, donc, pour avancer sur le chemin de la guérison : l’amour.


Une deuxième étape : reconnaître nos schémas inconscients

Dans tout processus de guérison, il est primordial de mettre le doigt sur nos schémas inconscients, nos mécanismes de protection. En effet, il y a beaucoup de mécanismes dans notre construction psychique, et un de ces mécanismes, c’est la fuite. 

On ne s’en rend pas toujours compte, mais le travail peut être une sorte de fuite. Sauf qu’avec la Covid-19, tout s’arrête. On subit l’arrêt du travail, et aussi de nos loisirs. Et on n’a plus nulle part où fuir….

Nous vivons ces situations comme des conflits, des privations de liberté, car nous ne les avons pas choisies. Cependant, il faut le reconnaître, nous sommes aujourd’hui en Occident et les deux dernières générations n’ont pas eu, à l’échelle de la société, à subir beaucoup de choses traumatiques ! Nous avons pris pour acquis notre confort et notre liberté, et avons oublié la réalité de la vie.

« Le confort, c’est une annihilation de soi. Ça nous trompe. »

Le confort nous fait croire qu’on a ce qu’on veut, que toute la vie est belle. On planifie, on se projette, on part du principe que l’on peut tout avoir exactement selon nos projets… Mais ce raisonnement peut aussi nous enfermer et nous empêcher d’accepter la vie comme elle se présente à nous, là où nos projets sont parfois contrecarrés. Contrecarrés, par exemple, par une pandémie mondiale qui, en plus de tout chambouler, nous met face à la mort. 

« Il ne faut pas la nier, cette mort. (…) Quand on est heureux, on annonce et on rigole. C’est pareil pour la mort : on annonce, et on pleure ensemble. »

Et de cette mort, nos mécanismes de protection ne peuvent pas nous prémunir. Mais comment affronter la mort ? Germaine nous invite à mettre des mots sur ce que l’on traverse : la maladie, la mort, le deuil, la souffrance. Nommer l’innommable, en quelque sorte, pour pouvoir ensuite le guérir. Et c’est là un chemin à emprunter à plusieurs : c’est-à-dire avec nos proches, mais aussi avec un thérapeute, quelqu’un qui nous accompagne.

« Vous avez le droit d’avoir peur. Vous avez le droit de pleurer. Mais faites-le en famille. » 


Une troisième étape : apprendre à écouter

On le sait et on le répète souvent, nous vivons dans une société d’informations où nous sommes sans cesse bombardés de messages et de stimulations. Les médias sociaux nous encouragent continuellement à interagir. 

Et si, dans cette course folle, nous avions perdu notre capacité d’écoute ? Cette écoute de l’autre, mais aussi de nous-même ? 

Une écoute sincère et authentique, et qui s’inscrit dans une démarche de recherche de vérité, est nécessaire pour mettre des mots sur les maux. Et, ainsi, avancer vers la guérison.

« La vérité et l’écoute, c’est permettre à l’autre de dire ou de ne pas dire ; de dire ce qu’il a envie et ce qu’il vit. »

Et si la vérité fait mal ? Ne serait-ce pas mieux de la masquer ou de la déguiser, pour atténuer la souffrance ? Germaine insiste : la vérité empêche une douleur encore plus profonde

La vérité empêche le risque que le lien avec l’autre soit faussé parce que l’on n’ose pas dire les choses (que ce soit parce que l’on se cache, parce que l’on a peur de faire mal… ou quelle que soit la raison !). Une bonne communication est donc essentielle.

Or, les mots sont créateurs. S’ils sont négatifs, ils perpétuent le négatif ; s’ils sont positifs, c’est-à-dire s’ils ouvrent à la relation, alors ils pourront amener la guérison.

L’écoute, parfois, c’est simplement de faire savoir à l’autre que l’on est disponible pour parler. Que l’on se tient prêt à entendre, à recevoir ce que l’autre a besoin d’exprimer. C’est dire : « Je suis là. »

« Pour moi, tout ce qui est caché est mauvais. » 

Bien sûr, cela nécessite d’être prêt à accueillir ce qui est dit, de ne pas avoir peur de la vérité en question… D’où l’importance d’être entouré, pour faire face aux tensions et aux difficultés ensemble, et traverser à plusieurs ce chemin de l’écoute et de la vérité

Avez-vous besoin d’écouter et d’être écouté.e ? 

Si vous avez des questions, des besoins, si vous voulez commencer un travail, Germaine Pomier vous encourage à trouver des ressources pour, peut-être, commencer un chemin d’accompagnement*. 


Et si la foi changeait les choses ?

Tout ce travail d’écoute et d’accompagnement, Germaine l’aborde avec une foi solide en Dieu : le Dieu de la Bible qui s’est révélé en Jésus-Christ. Selon elle, connaître Dieu change profondément la manière d’appréhender l’autre. 

« Peu importe qui elle est et ce qu’elle a fait, Jésus est mort pour cette personne. Il est ressuscité pour cette personne. Et il veut lui offrir une vie avec lui pour l’éternité. »

Germaine voit donc chaque personne comme quelqu’un avec qui elle pourrait vivre l’éternité, ce qui change forcément sa perspective sur l’autre.

« Face à une personne en difficulté, ma priorité est de savoir où cette personne va passer l’éternité. »

Car, selon Germaine, être en bonne santé n’est pas tout. Quels sont nos objectifs de vie ? S’il s’agit seulement d’avoir une belle maison, un bon travail, une belle famille qui va bien, n’est-ce pas là bien insuffisant ? 

Avec la foi chrétienne, affirme Germaine, la vie sur cette terre n’est pas considérée comme une fin en soi. Au contraire, elle n’est que le lieu où la vie commence : physiquement, psychiquement, mais aussi spirituellement. Sous cet angle, nos souffrances et nos processus de guérison revêtent encore plus d’importance, car ils s’inscrivent dans une perspective d’éternité. 

Et pour vous, la spiritualité joue-t-elle un rôle dans le cheminement vers la guérison ?


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Notre invitée :

Germaine Pomier est infirmière, actuellement de bloc opératoire césarienne, ainsi que conseillère conjugale et familiale. Pendant sept ans, elle a été infirmière dans une maison d’accueil pour les adultes en difficulté (polytoxicomanes, en rupture familiale, souffrant de maladie psychiatrique ou d’alcoolisme, etc.) et poursuit aujourd’hui son activité en milieu hospitalier. Elle est aussi en relation d’aide au sein de l’association AFP.écoute (www.afp-federation.org).


*Germaine Pomier travaille aujourd’hui avec l’association AFP.écoute, qui propose des parcours d’accompagnement et de relation d’aide pour les individus, les couples ou les familles. Si vous êtes intéressés, vous pouvez la contacter via le site Internet afp-federation.org. N’hésitez pas !

Rédacteur

Sagesse et Mojito

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Contributeur

Léa Rychen

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Contributeur

Christel Lamère Ngnambi

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Jean-Christophe Jasmin

Contributeur

Jean-Christophe Jasmin

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